103

*
Cette fin d’août étrange a des airs de septembre
Rentrée, cohue, retours sur la machine
Mon érable s’inquiète, il a les feuilles qui tremblent
Et mon hamac, le soir, a le giron humide.
On se levait au jour et on se lève à l’aube
L’horizon est blafard et le soleil livide
Les tournesols fatiguent et regardent le sol
On s’observe à l’âme et on voit qu’il fait noir
C’est août et donc septembre, il faudra qu’on s’échine
Consommer, s’acquitter, exercer, faire le job
Se rendre compte soudain de tout ce qui nous manque
De la famine de l’être et de nos comptes en banque

*
Cette faim, doute étrange, a des airs de septembre

102

*
N’occuper nulle place
Voilà ce qui menace

*
J’ai perdu mon portable
C’est vraiment formidable

101

*
Une miniature idéale prendrait plus de temps à lire qu’à écrire. On y travaille.

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La pensée qui précède est inspirée par Robert Walser. Lui alors n’avait aucun problème pour produire de telles choses. Il a même, avec ses quelques romans, réalisé les miniatures les plus considérables – et fractales - qui soient (plusieurs centaines de pages). Ecrits en quelques semaines, ils peuvent être dégustés pendant des siècles, tout comme chacun des fragments qui les constituent. « Le brigand », par exemple, commence comme ceci : « Edith l’aime. Nous y reviendrons ».

100 !

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Certaines personnes comprennent au bout d’un certain temps que mon humour est drôle, et rient alors instantanément.

*
D’autres, ben, non.

99

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Où va-t-on, si la guerre se remet à faire des victimes dans les rangs militaires, si La Poste se met au Marketing, si André Glucksmann persiste en ses liftings ? Ne pourrait-on pas enseigner la guerre moderne à tous ces afghans ? Où va-t-on ? Mais Où va-t-on ?

*
De l’autre côté du mur, il y a le même mur.

98

*
Et les Jeux, dans tout ça ? Ah oui ! Les Jeux…
Non, je ne boycotte pas. Simplement, les rouleaux des Landes ont fait fondre mes muscles de cycliste, et quant au ping-pong il y avait bien une table au camping mais pas un seul chinois. Or, comment prétendre à une médaille en ping-pong si l’on ne bat pas au moins un chinois ?

*
Il y a une autre raison, c’est Patrice Montel, champion de l’ineptathlon, sommet cauchemalayesque du chauvinisme merdouillard. Cet étron, il faut absolument que Christine Aron et Muriel Hurtis l’entraînent dans les replis du studio et lui fassent le javelot bulgare, le Fosbury auvergnat, le double flip tchetchène, l'uppercut et Russe, la goulue moluque, etc et bref, mais qu’il n’en réchappe pas !
(Ce qui précède n’est pas de la violence contre journaliste, c’est de la prophylaxie mentale. On en viendrait presque à regretter la récente disparition de Thierry Gilardi, si l’on songe que la camarde eut pu au lieu de lui choisir l’étron total…)

97

*
Plage :
Tout ce sable brûlant de l’été
Ne suffit pas à oublier
Ce minuscule sablier
Où passe et passeront tous les âges
Où sont passées plein tant d’années

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Pour soulager cette femme aux jolis traits (elle avait oublié de composter), je suis allé quérir le contrôleur zélé. J’oubliais moi-même avoir omis de prendre un billet.
L’amende fut considérable, et cela fait des rimes regrettables.

96

Il restera le drapeau rouge
Dans le miroir voilé par d’eau
Tout à l’heure l’écume viendra l’effacer toute blanche
Se lit sur le sable de bas en haut
Ce poème de plage au drapeau rouge

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Camping
Pluie
Froid
Au bout du troisième jour, une délégation conduite par toute ma famille est venue me prier de lever le camp.
Je ne savais pas qu’ils pouvaient être si nombreux.
En otage ils avaient le bouchon de mon matelas.
"Nous rentrons", ais-je dit. "Gardez le !"
Quelques "Hourra" s'en suivirent.

95

*
Elle
Seule
Belle
S’ennuie
S’ennuie au point qu’elle me sourit
Et moi maintenant
Seul
Belle
Si seul
Seul comme quand elle
(c’était une autre)
Voulait me toucher le visage de ses mains
Et y renonçait.

*
Camping :
Sous le grand chêne séculaire
La pluie à force tombe tout pareil
Et on se retrouve comme des glands

94

*
Plage :
L’oreille collée au sable
J’entends des pas qui approchent
C’était le temps qui passe
Et va s’asseoir plus loin

*
Camping :
Entre nos deux matelas gonflés,
La ruelle.
Au matin mon épaule
A pris l’empreinte des pavés.

93

*
Dans les trains de nuit, seules les extrémités des wagons sont allumées.

*
La nuit
(« Tu crois qu’on y entre facilement, papa ? »)
Je voyage de l’autre côté du monde
Au moins il y fait jour
Ou bien je reste ici si c’est la pleine lune
Et je roule
Dans la nuit blanche
(Oui, cette blancheur là)

92

*
J’ai rencontré une femme très belle qui parvient à faire autre chose qu’être belle. Ce qu’elle fait est plus banal qu’être belle, plus juste, mieux articulé, peut-être même est-ce plus utile. Cette femme décidément est très belle.

*
« Ce dont on a besoin, on le trouve partout », remarquait Robert Walser

91

*
Rimes regrettables :
Fais de ta vie un rêve !
M’avait-on dit
J’ai essayé et je me suis cogné
Aux murs rudes de la réalité
Ecarte donc les murs !
M’a-t-on encore dit
J’ai essayé et je suis tombé
J’avais ce peu de foi dont à coup sûr on crève
Au fond du trou j’ai retrouvé les murs

*
N’évoquons même pas le mot « bouleversés » : ils n’acceptent même pas d’être dérangés !

90

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- Qui c’était, déjà, cette actrice dans « 37°2 le matin » ?
- J’sais pas. « 37°2 C le matin » ? Connais pas.
- Eh bien… Vous lui ressemblez énormément !
- Fanny Ardant ? Emmanuelle Béart ? Mathilde Seigner ? Anna Mouglalis ? Faye Dunaway ?
- Non, non… Beaucoup mieux que ça ! Au fait, vous connaissez l’histoire de la grenouille avec la grande bouche ?
- Lina Lollobrigida ? Brigitte Lahaie ? Tracy Lords ?


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Il faut battre l’éphèbe tant qu’il lèche O.