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Trf((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((((Dabek se réveille en pleurant. Dans la nuit il a croisé à nouveau cette veuve seule à l’arrière sur un tandem que plus personne ne conduisait.

*
Plus on a de but
Moins ça a de sens




(Je m’étais absenté un instant pour arrêter les pommes de terre, et la chatte en a profité pour mettre sa patte sur ma littérature)

533



Des cordes reliaient nos hameaux, jamais plus loin que la longueur d’une corde. Le soir et jusque tard dans la nuit on voyait toujours les feux des autres, on entendait leurs chants. D’autres cordes les reliaient comme nous à d’autres hameaux. Par une langue de tractions on communiquait entre hameaux par les cordes. Ce n’était jamais quelqu’un d’identifiable, c’était un autre hameau, un autre nous. Il n’y avait pas de plafond, mais quelque chose entre nous et le ciel.

*
Funambule il tient la longue flèche de ses ailes et reste à sautiller entre nous et le ciel, escargot perdu loin du miroir de sa bave, ne sachant plus ni tomber
ni s’envoler

532

J’ai possédé quatre vélos dans ma vie. 
Enfin : cinq si on compte le petit vélo vert, le petit vélo vert qui, quand on est allé l’acheter avec mon père, était un immense vélo vert.
Rappelle-toi, Samantha, il faisait soleil sur Brest ce jour là,
Et le soleil faisait briller les rayons de mon immense petit vélo vert,
Et je me suis demandé du haut de la trop haute selle et de mes sept ans,
Samantha
Ce qui se passerait si je mettais les pieds dans les rayons de l’immense petit vélo vert qui étaient aussi les rayons du soleil qui pleuvait sans cesse sur Brest ce jour là, Samantha
Eh bien je ne me rappelle pas,
Samantha
Mais je devine :
J’ai fait un immense soleil
Sur Brest
Ce jour là

*
Le temps des astrophysiciens du troisième millénaire s’organise en spirale rentrée dans la montre qu’un bracelet enroule autour de son poignet.
Remuant, remuant, remuant le poignet,
Grâce à un mécanisme ingénieux,
Dabek
Remonte le temps.

531

A peine vue
Dans sa robe noire avec grand balcon
Je l’ai appelée
« Mon quatre heures »
Car j’ai su que ça n’attendrait pas
L’heure du thé 
Le jour des RTT
Et que serait tout à l'heure, à quatre heure 
Rapide et joyeux
Avec de la confiture sur les doigts
Et dans les yeux

*
Amour toujours,
Je termine toujours
Avant la fin
C’est malin
De l’amour

530

De haute lutte Dabek a conquis son numéro de portable puis, à l’issue d’une savante suite de SMS (humour, attentives attentions et allusives allusions, références musicales choisies) visant à obtenir un rendez-vous seul à seule, a découvert en s’y rendant que c’était celui d’une autre.

*
Les choses ne sont jamais différentes de ce qu’elles pourraient être.

529

Visite (ça faisait un bail) sur le blog « l’autofictif » qui inspira celui-ci. Eric Chevillard auteur dérangeant, fécond, misanthrope, acéré, tout à la fois marginalisé et institutionnalisé. Il s’est délocalisé dans le dijonnais, et commença d’ailleurs sa suite en comptant les brins d’herbes. Il l’abonde chaque jour ou presque depuis fin 2007, s’y éreinte, s’y réinvente, s’y étiole, s’y renouvelle. Projet pharaonique, admirable, touchant, littéralement VOUE à l’échec, ce qui en fait la véritable grandeur. Le dernier chiffre approche, le nombre de « j’aime » décroit, sera-ce moins de 3000 triptyques, plus de 10 000 ? Tout cela (et le dijonnais sur l’herbe) fait penser à l’aquarelliste de Perec. Respect Eric, Respect.

*
Puis le jour se lève tout prêt, médicalisé, presque déjà terminé, rien ne le séparant du suivant qu’une dose de temps et d’obéissance.

528

La ville ne parvient pas à imposer son rythme au fleuve qui garde son humeur de promeneur qui a survécu à toutes les guerres. Qu’est-ce donc que le fleuve est venu chercher ici ? Rien. Il ne fait que passer, avec calme, depuis toujours, à l’image de ces quelques pêcheurs aux ongles plein d’écailles.

*
Des bois flottés, à la surface des eaux marron, jouent une valse triste.