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Il est un lieu d’hiver où tout est blanc. J’ai vu le blanc et puis j’ai discuté avec les gens. Dans ce pays m’ont-ils dit rien n’est blanc. Ce n’est jamais le blanc il y a le jeune, le las, le mat, le frêle, le tassé, celui qu’on voit comme au travers d’un diamant, le stérile le futile le brassé l’immaculé le bizarre le pérenne celui avec des traces celui qui se tait celui sous lequel on entend le murmure de l’eau qui bourgeonne ce n’est jamais le blanc il y a dans ce pays un mot différent pour presque chaque blanc si bien que finalement en sortant de la cafétéria je n’ai plus du tout vu tout ce blanc que je voyais avant.

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Ils ont aussi des dizaines de mots pour dire la neige qui tombe, d’autres encore pour la dire étalée sur la terre, je me fais expliquer ces mots et ensuite la neige ne tombe ni ne repose plus comme avant. J’ai beaucoup appris de ce pays qui n’a pas de mot contrairement à ici pour dire ce que ne peuvent dire les mots, c’est pourquoi lorsque je trouve plus les mots pour dire je laisse tout en plan je ferme les yeux je me transporte en ce pays je regarde tomber les mille neiges derrière mes paupières de feutre où elle viennent se poser chaque fois différemment : indiciblement.