188

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Cheminant depuis toujours sur un cercle parfait, il pense avoir sans cesse refait le même chemin.

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Il ne sait pas : où il est, qui sont les autres. Il ne sait pas.
(Moi, je suis dans le bus)

187

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Un fleuve plein de débit de l’eau vient me rejoindre quelques heures dans mon lit du matin. On cause. Il ne comprend pas bien cette histoire d’embouchure. Pour la troisième fois je lui répète que je n’ai pas d’embouchure mais il ne comprend tout simplement pas et finit par repartir en me faisant promettre de l’y rejoindre.

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Et si le bouché c’était moi ?

186

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Si l’on considère que le tac de la pendule annule le tic qui l’a immédiatement précédé – ce dont on peut aisément se convaincre en écoutant longuement et attentivement l’un puis l’autre -, alors le temps du monde restera à jamais inférieur ou égal à la seconde qui nous sépare – nous, homo sapiens - de ses débuts, il y a quelques quinze milliards d’années.

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20 ans après
Ils ont échangé leurs places dans le lit
Elle a super bien dormi
Pas lui

185

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Je ne porte jamais de jugement sur les minables

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Ils m’en veulent

184

C’était l’heure entre chien et loup
Entre suie et poix
Entre regards et lèvres - Entre bonheur et rides - Entre le nid et l’aigle - Entre la marche et le temps - Entre bien-être et servitudes - Entre le lit et le berceau - Entre le tic et le tac - Entre le pouce et le prendre - Entre lied et harmonie - Entre la chatte et ses petits – Entre le rêve et l’oreiller - Entre souvenirs et absence - Entre le désir et la soie - Entre l’avis et le passage – Entre le flocon et la Meije - Entre la moue et l’amour - Entre les nuées et le fleuve - Entre l’homme et la mouette – Entre l’enfance et l’amitié - Entre les trois coups et l’entracte - Entre le chêne et le roseau - Entre les rires et les pleurs - Entre la finance et la misère - Entre le zouave et Lady Di - Entre l’appeau et l’oiseau - Entre la vague et l’écume – Entre chemin et demain - Entre le môme et la fronde - Entre Corbière et Baudelaire - Entre le silence et l’écrit
- Entre l’avis et le décès

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Voilà, vous avez lu de l’Eluard, et ce qui s’en est suivi. Continuez.

183

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C’est la débâcle économique. Sous le glacis boursier qui se déchire un autre monde se découvre, où les lingots coulent comme des cailloux. Mystérieux et familier, il s’offre aux poissons que nous fûmes, fluide, vivant, mobile, vif argent. Sous les pavés de la glace qui explose : le printemps, le regain. L’économie n’existait pas, la banque était banquise stérile, on découvre ça. Il n’y a que nous, et ce printemps à féconder.

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Alors, on plonge ?

182

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Elle s’emprisonne
Elle s’évade de sa prison
Elle s’emprisonne
Elle s’évade de sa prison
Elle s’emprisonne
Elle s’évade de sa prison

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Entre son miroir et elle il y a très exactement ce qu’elle n’atteindra jamais mais qui l’occupera toujours.

181

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Quinze centimètres d’une neige lourde et mouillée sont tombés, puis la burle malgré ce poids a bouleversé l’immensité blanche de la combe. Cela donne un océan planétaire faussement homogène fait de stries, ondulations, congères, amas plâtreux, plaques gelées, zones soufflées où parfois la prairie dépasse en épis et d’autres fois transparaît, haut fond jaunâtre, à travers une mince pellicule de glace. De petits pins parasol, expressifs comme des oliviers, sont clairsemés sur mon parcours comme autant d’obstacles météorologiques. Sur et entre tout cela je glisse, me jouant des pentes et contrepentes, « lisant » comme un routeur les meilleures trajectoires pour rallier le but en vainqueur solitaire.


J’étais parti du lieu dit La vacherie et, optant mieux à chaque instant que mes collègues circumnavigateurs, je suis rentré aux Sables d’Olonne deux jours avant Michel Desjoyaux lui-même loin devant tous les autres.